mardi 9 avril








4月9日(火)
le pavillon d'argent
et la voie de la philosophie
Après ma douche, j’ai, comme tous les jours, le droit à un petit-déjeuner bouillon, thé, petit gâteau de riz et demi-orange. Je suis prêt, le temps est magnifique, je pars à 8h (car il y a beaucoup moins de touristes le matin) pour la gare (située à 20 minutes) où je prends un bus qui me mène en trois-quart d’heure au ginkaku-ji. Effectivement, il n’y a pas encore grand monde. Le ginkaku-ji, appelé aussi pavillon d’argent, fait vraiment concurrence à son aîné, le pavillon d’or. Mais il n’est pas du tout recouvert d’argent, c’est un souhait du shōgun Ashikaga Yoshimasa (1436-1490) qu’il n’ a jamais réalisé. Peu de temps après sa mort, le lieu fut transformé par l’école bouddhique zen Rinzai en temple, le Jishôji.
Des jardiniers sont déjà à l’œuvre et la visite du jardin apporte un apaisement dans le calme zen qui y règne. Au-delà dujardin sec, un jardin de mousses superbement entretenu serpente un peu à flancs de colline et offre une calme promenade à travers la végétation, sorte de havre de paix en pleine nature. En bas, le temple se laisse observer, siégeant sur son monde. Je prends mon temps dans les allées toujours balisées par le panneau « route ». On ne peut rien visiter d’autre, mais le jardin veut qu’on y traîne un peu.
C’est de genkaku-ji que part le chemin (ou la voie) de la philosophie. Le nom de la promenade remonte au début du XXe siècle. Le célèbre philosophe zen Kitarô Nishida (1870-1945) l’empruntait lors de sa méditation quotidienne pour rejoindre l’université de Kyoto, où il fonda l’école philosophique. Ce chemin longe un canal bordé d’une belle végétation et surtout de cerisiers, ce qui, en cette saison, est vraiment fascinant à voir. Peu de promeneurs à 10h du matin : j’apprécie beaucoup.
De temps en temps, on croise un temple ou un sanctuaire au flanc de la colline. Il y en a vraiment beaucoup. Je ne fais le détour que pour quelques-uns. Tout d’abor le honen-in, un cadre qui sied au silence. Des statues de pierre veillent au lieu. À noter que le moine principal de honen-ni accueille depuis plus de vingt ans des artistes contemporains venant du monde entier, considérant que la fonction des créateurs n’est pas éloignée de celle des religieux. Redescendant jusqu’au chemin de la philosophie, je m’arrête ensuite au sanctuaire otoyo, qui est le seul sanctuaire shinto japonais à être gardé par une paire de divinités souris au lieu des chiens-lions habituels (j’avoue humblement que je n’ai pas fait attention). Ensuite c’est le sanctuaire nyakuoji (avec ses chiens-lions celui-là), surtout planté d’érables (ça doit être beau en automne).
Je marche encore jusqu’à arriver au temple eikan-do. Je l’ai beaucoup aimé car on peut y déambuler dans les espaces intérieus et extérieurs (en enlevant ses chaussures bien sûr) et admirer ses nombreux bâtiments, dont certains laissent voir leurs panneaux coulissants décorés, les nombreux jardins très bien entretenus (jardins de mousse ou jardins secs). Je n’oublie pas la pagode située sur une hauteur et d’où l’on peut bien apercevoir kyōto.
Puis vient la gigantesque porte sanmon du temple nanzen-ji-ji, d’une hauteur de 22 mètres, qui symbolise les trois routes de la libération bouddhiste (san veut dire 3 en japonais). Je grimpe en haut de la porte pour découvrir l’immense jardin ainsi que plusieurs des bâtiments qui composent cet énorme complexe. Mais je ne peux tout voir. Des lycéens ayant terminé leurs cours passent par le jardin.
Le chemin de la philosophie s’arrête là, deux jeunes lycéennes ont terminé leur journée, et je continue, un peu par hasard, jusqu’à un lieu très prisé des japonais, surtout à l’époque des cerisiers en fleurs : la kaege incline, qui est une ancienne voie ferrée désaffectée de 22 mètres de large qui servait sur une longueur de 600 mètres environ et avec un dénivelé de 36 mètres, à transporter marchandises, passagers et même navires du canal du lac biwa jusqu’à kyōto (la chute d’eau correspondante du canal produisait (et produit toujours) de l’électricité pour kyōto. On est envoloppés de cerisiers en fleurs : c’est vraiment exceptionnel comme impression. Un endroit idéal pour se promener et pour faire des photos de mode !
Et puis c’est le très grand heian shrine, sanctuaire shinto érigé en 1895. Ce complexe rend en hommage à la ville qui fut la capitale impériale du Japon durant la période de Heian dans l’Antiquité (Heian est l’ancien nom de kyōto. On ne peut manquer son énorme torii vermillon en béton. Les bâtiments sont très beaux mais je commence à avoir mal aux pieds et je décide de ne pas tenter la visite car il me reste encore du chemin à faire avant la fin de la journée. Mais je reste un moment à observer les bâtiments de l’extérieur et je suis toujours frappé par l’expertise des charpentiers pour la construction des toitures.
Longeant encore une petite rivière et empruntant de petites ruelles avec des maisons au style traditionnels, dont certaines semblent très vieilles, j’arrive au quartier de gion où j’étais hier et je reprends la hanamikoji dori de bout en bout pur atteindre le temple kennin-ji, mon dernier temple de la journée, que je veux visiter celui-là. Dans la rue il y a, comme toujours, plusieurs groupes de jeunes filles en kimono.
À l’entrée du temple, j’enlève mes chaussures et je suis admiratif de tout ce qu’on peut voir (et en outre, il est bien indiqué qu’on peut prendre des photos) : les différents bâtiments avec leurs pièces ouvertes qui permettent d’observer les panneaux coulissants décorés, les jardins intérieurs, sable ou mousses (d’ailleurs un couple est en train de méticuleusement nettoyer les mousses. Pour le bâtiment des dragons jumeaux, on nous prête aimablement des savattes car on doit traverser un passage en pierre (ce n’est plus du bois). J’ai vraiment su mal à marcher avec ça : je perds tout le temps mes savattes. Mais j’arrive tout de même à destination : le dharma hall. L’intérieur est éblouissant avec son hôtel qui conserve précieusement les reliques de shakyamuni tathagata (vous connaissez ? moi non), et la peintue des dragons jumeaux (11,40 m x 15,16 m), réalisée pour la commémoration du 800è anniversaire de de la fondation de kennin-ji. L’artiste a mis 2 ans à terminer cette œuvre.
Et pour terminer ma longue journée de visites, je décide de rejoindre le musée national de kyōto, bâtiment en briques, pas du tout dans le sty japonais. Oh ! malheur ! Il est fermé à cause de l’installation d’une nouvelle installation. Moi qui avait fait tout ce chemin. Mais je peux tout de même visiter le jardin, et comme c’est gratuit pour les vieux comme moi (+70), je n’hésite pas et ça me permet de mieux voir le bâtiment, ainsi que le penseur de Rodin, qui n’en finit pas de penser.
J’ai chaud, je suis fatigué. Je prends donc un bus jusqu’à la gare de kyōto avant de rentrer à pied à mon hébergement. C’était une fatigante mais belle journée, assez zen quand même.